L’article s’intitule Ces choses que toutes les mamans font. Il est signé Arthur Dacquet, Designer UI/UX, payé (sans doute très mal) par le site WeMums pour rédiger de petites pépites sur la maternité. Des articles à faire pâlir les journalistes de Mediapart tant ils sont fouillés, documentés et argumentés. Avant de rédiger un article intitulé Ces choses que toutes les mamans font, ce cher Arthur Dacquet aura sans doute réalisé une étude ethnographique poussée. Comment pourrait-il affirmer, sinon, que toutes les mamans, si, si, toutes, du Groënland au Congo en passant par l’Espagne et la Chine (toutes les mamans on vous dit !), toutes les mamans donc font, pensent ou ressentent les choses suivantes. Il s’inclue même dans le lot. Oui, Arthur Dacquet nous connaît tellement bien qu’il s’identifie à nous, les mères ou plutôt les « mums », c’est tellement plus chébran. Il sait ce qu’ON fait toutes Arthur Dacquet. SI, si, toutes.
On va faire un tour dans la chambre de nos enfants pour voir s’ils dorment bien, s’ils sont bien couverts, avant d’aller nous même nous coucher.
Parfois, on est trop contentes de les confier à quelqu’un d’autre et pourtant deux minutes après leur départ, ils nous manquent déjà !
On est débordées avec la lessive, le repassage, les to do list….et on rêverait d’avoir un assistant personnel pour gérer tout cela !
On comprend toutes mieux nos mamans depuis que nous sommes nous même devenues maman…
On se réveille au moindre bruit la nuit.
On imagine les pires scénarios dès qu’ils se mettent à éternuer.
On a notre enfant sur le fond d’écran de notre téléphone
On est tellement fière la première fois qu’ils disent « maman » et on le regrette (parfois) quand en grandissant ils le crient à travers l’appartement.
On craque (toujours) pour des vêtements pour nos enfants alors qu’au départ on étaient juste parties pour faire des courses pour NOUS !
On a toutes la larme à l’œil au premier maman au premier Je t’aime, le premier jour d’école de notre enfant…
On avait toutes des principes… avant d’avoir des enfants. Et puis ça a (un peu) changé avec les enfants !
On rêve de faire la sieste.
On ne parle que de son bébé pendant des soirées entre copines, alors qu’on s’étaient promis de ne jamais le faire !
On se couche trop tard et on se réveille toutes trop tôt.
On est totalement addict à l’odeur de notre bébé.
On aime de façon inconditionnelle.
Voilà, c’est ça une mère. Arthur Dacquet le dit. WeMums le dit. Une mère c’est une accro du shopping contrariée qui ne peut même plus sortir pour s’acheter des fringues sans se prendre les pieds – et le portefeuille – dans une grenouillère, une gigoteuse ou une salopette.
C’est une femme qui ne vit plus que pour son marmot, qui est bien incapable de parler d’autre chose (on se demande d’ailleurs comment elle fait toute la journée au boulot pour se retenir, elle ferait mieux de rester à la maison ce qui rendrait sa passion absolue pour son môme compatible avec son activité quotidienne).
Une femme qui aime inconditionnellement son enfant, ce qui se traduit forcément par une fâcheuse tendance à lui renifler, le cou, le nombril ou les aisselles. D’ailleurs les mamans aiment toutes passionnément le caca, le vomi ou tout autre fluide corporel issu de leur progéniture.
On imagine volontiers la jeune mère penchée sur le berceau de son tout petit, les yeux embués de larmes et posant délicatement la main sur sa poitrine pour vérifier qu’il respire. Sans ce rituel du soir, la mère ne dort pas. De toute façon, d’après Arthur, la mère ne dort pas, ne dort plus. Elle se couche trop tard et se lève trop tôt. Et quand elle pourrait dormir, cette conne, elle se réveille au moindre battement de cils de son nourrisson. Et elle aimerait tant faire la sieste. Ou faire du shopping. Ou faire la sieste. Ou parler de son mioche. Ah mais non, elle ne peut pas, elle doit faire la lessive et/ou le repassage.
La maman ne sait pas déléguer, ne sait pas se séparer de son cher enfant plus de 10 secondes, ne sait pas se reposer. Elle est tout le temps inquiète et chiale pour un rien.
La mère selon Arthur existe sans doute mais elle n’est certes pas toutes les mères.
Moi, j’ai entendu dire et j’ai même parfois vu de mes yeux (peut-être même que j’en suis), des mamans retourner au boulot la fleur au fusil après un congé maternité plus proche de la torture chinoise que de la béatitude extatique. Je les ai vues confier sans broncher leur minot à la nounou à 8h30 et se réjouir de n’avoir pas à gérer des pleurs, des cris, de la purée partout et du caca toute la journée. Je les ai vues faire du shopping et s’acheter sans sourciller une paire de chaussures dont elles n’ont absolument pas besoin. Elles auraient effectivement bien craqué sur ce petit pyjama à pois pour leur crapaud ou crapette mais les caisses sont vides. Tant pis, le mois prochain. Sauf si des chaussures encore plus irrésistibles se présentent… J’en ai connues qui se sont barrées avec leur mec pour des vacances au bout du monde en laissant leurs petiots aux grands-parents et elles n’ont même pas culpabilisé. Comment est-ce possible ? J’ai vu des mères (et peut-être que j’en suis) qui ne répondent pas au combo couchées-trop-tard-levées-trop-tôt parce qu’elles préfèrent dormir assez et sauter une lessive. J’ai vu des mères qui avaient la chance d’avoir auprès d’elle une espèce assez répandue appelée père ou encore homme. Certains individus de cette espèce s’investissent et dans leur couple et dans leur famille et prennent donc leur part de tâches ménagères ce qui permet à tout le monde de dormir autant qu’il en a besoin. Oui, parce que tous les bébés ne passent pas 3 ans sans dormir plus de 2h d’affilée. Certains finissent par faire leurs nuits. Et parfois même assez tôt.
Ce n’est donc pas toujours impossible de se reposer quand on est maman. Ça peut l’être mais ça n’est pas une règle absolue. Et donc les mamans épuisées ont le droit de se plaindre. Parce que ça n’est pas la normalité d’être épuisée, de pleurer tout le temps et de sentir que notre vie nous échappe. L’idéal serait quand même qu’être maman ça ne soit pas que du poids, des responsabilités, de l’inquiétude, de la fatigue, de la galère. Parce que si ça n’est que ça c’est que quelque chose ne va pas. Si on ne pense qu’à ça, qu’on ne fait que ça, c’est que quelque chose ne va pas.
Toutes les mamans ne sont pas des sortes de loques humaines réduites à deux énormes cernes.
Toutes les mamans ne sont pas des mères inquiètes, adorantes, dévorantes, exclusives. Toutes les mères ne pleurent pas en laissant leur gosse chez la nounou ou à la maternelle pour la première fois. Certaines mères aiment (oui, aiment) être séparées de leur petit pour une heure, un jour, une semaine. Elles aiment aller bosser, elles aiment partir.
J’en ai marre de lire partout, d’entendre partout qu’être maman « c’est de la fatigue MAIS c’est aussi beaucoup de bonheur ». Ça n’est pas tout le temps fatiguant, ça n’est pas non plus tout le temps beaucoup de bonheur. Alors Arthur, il y a plein de mamans. Des mamans afghanes, des mamans syriennes, des mamans françaises, des mamans sénégalaises, des mamans chinoises, malgaches, inuits, guadeloupéennes, des mamans brésiliennes, bref, des mamans il y en a dans le monde entier qui ne se reconnaîtraient sans doute aucunement dans ce ramassis d’inepties. Il y a plein de mamans, plein de bébés et aucun n’a envie d’être empaqueté dans ton lot de lieux communs.
Cher Arthur Dacquet, à tes heures perdues, lorsque tu n’es pas en train d’écrire des conneries pour gagner ta croûte, tu vends des fringues de sport sur arthurdacquet.fr. Continue et laisse nous peinardes NOUS les mères. Si tu fais ça, promis, on t’achètera un petit jogging pour bébé.